Haricots d'Echenans à la tomate

[Anne]

Ah, la graisse de canard !
Tes enfants avaient bien raison, Cat, c'est le truc qui fait bon.
Moi, je n'ai découvert ça qu'une fois adulte, parce que dans la famille, la cuisine, c'était à l'huile d'olive ou au beurre. Mais depuis, j'en ai toujours un pot à la maison, et pendant mes 12 ans d'expat' outre-Pyrénées, où je n'en trouvais pas, je refaisais mes stocks chaque fois que je revenais en France.

Grâce à une copine d'origine paysanne sarthois qui m'a servi un jour un plat de pommes de terre absolument renversant, j'ai aussi découvert la cuisine aux rillettes.
Une paire d'oeufs au plat cuits dans un peu de rillettes fondues dans la poêle, c'est à tomber.

Pour les fameuses pommes de terre, faire fondre un beau morceau de rillettes, puis ajouter des pommes de terre coupées en dés et une bonne quantité d'oignons émincés , et faire cuire à petit feu en remuant de temps en temps. J'ai un peu mis ça à ma sauce, en remplaçant les rillettes de porc par des rillettes de canard ou d'oie parce que je trouve que c'est encore meilleur, et je rajoute une pincée de thym parce que j'adore ça.

Le beurre, souvent, je n'en ai même pas à la maison, j'en achète quand je dois faire de la pâtisserie. Mais à l'occasion, je m'offre chez un crémier un morceau de beurre cru demi-sel que je déguste béatement, nature sur une tartine de pain grillé. Une tuerie !

[Cat69]

Mais c'est génial cette idée de cuisiner aux rillettes ! Et simpissime! Merci beaucoup, décidément tu es une mine Anne!
Les origines et habitudes d'enfance nous formatent beaucoup, je n'aime l'huile d'olive que dans certains contextes, et jamais pour faire cuire. J'ai honte mais je fais la ratatouille sans poivrons bien évidemment ni aubergine, et cuite au beurre! Je vais me faire lyncher par les sudistes...
Quand il n'y a plus de beurre à la maison c'est la cata, je ne sais plus cuisiner .
Après, il y a pas mal de choses que je fais volontier cuire à la graisse de canard , certaines dans l'huile de coco aussi. C'est bien sympa.

[Alain60]

Oui Cat, en d'autres lieus tu aurais peu te faire crucifier pour de tel propos blasphématoire concernant la ratatouille mais il y a déjà tellement de violences vers l'est que pour cette fois tu es pardonnée !

[Anne]

Il n'y a qu'une règle en cuisine, c'est de se régaler. Ta ratatouille n'est peut-être pas la "vraie", mais du moment qu'elle est bonne, je ne vois pas où serait le problème...

L'huile d'olive, c'est un sujet complexe que je n'ai appréhendé que lorsque j'ai vécu dans le sud de l'Espagne. Certes, j'en avais toujours vu à la maison, maman cuisinait beaucoup avec, mais personne ne se posait trop de questions.

Arrivée en Espagne, chez tous mes amis, il y en avait toujours au moins trois sortes différentes, ils se refilaient tous des adresses pour aller l'acheter à tel ou tel endroit, comme pour le vin chez nous, et je trouvais ça très exagéré.

Puis peu à peu, mon palais s'y est fait, s'est affiné, et j'ai fini, moi aussi par faire une demi-journée de voiture pour aller m'approvisionner à la coopérative d'un village paumé dans les montagnes à l'écart des routes touristiques, à l'abri des brises de mer, et où on m'avait servi dans un bistrot qui ne payait pas de mine, une salade avec une huile d'olive, mais alors l'huile d'olive de ma vie, qui n'était vendue que dans le village.

Il y en a que je n'aime pas, celles qui sont très corsées, assez foncées en général, et qui sont trop amères à mon goût. Mais en fonction de la variété des olives, de l'implantation géographique, du sol, de la météo, des millésimes, etc on obtient des huiles qui n'ont vraiment rien à voir les unes avec les autres.

La première fois que j'ai commandé un petit déjeuner dans un café de village, et qu'on m'a apporté du pain grillé, de la confiture et un flacon d'huile d'olive, j'ai dû faire une de ces têtes... mais on s'y fait, on finit même par aimer.
La tartine de pain grillé frottée de tomate avec quelques herbes et un filet d'huile d'olive est devenu un de mes casse-croûte favori.

En France, une bonne huile de moulin est un vrai luxe, mais en Espagne, c'est très abordable si on reste à l'écart des routes touristiques, et c'est une des choses dont j'ai la nostalgie gastronomique avec le poisson acheté directement aux pêcheurs lorsqu'il rentrent au port, pour une bouchée de pain.

[Alain60]

Oui je plaisantais Anne, l'Espagne est le premier producteur d'huile d'olive et j'ai vu un reportage sur un gros producteur Espagnol qui se bat depuis des années pour faire reconnaître des appellations d'huile d'olive pas seulement en AOC comme actuellement, mais aussi en fonction des variétés d'olives.

[Anne]

C'est une culture qu'on n'a pas en France, à part quelques spécialistes. Il faut dire que les prix ont de quoi freiner les vocations.
C'est un univers aussi riche et varié que celui du vin. Et aussi passionnant.

[Cat69]

Justement c'est plutôt comme cela que j'appréhende l'huile d'olive, comme des produits très différents qui n'ont pas le même usage. Donc je n'en utilise pas beaucoup alors j'en ai " seulement" 3 différentes, achetées soit au producteur soit à l'huilerie de Beaujeu qui propose plusieurs origine.
En plus tu as les huiles d'olives noires et celles d'olives vertes, très différentes et inhabituelles pour la plupart des français, très herbacée. Plutôt à la mode mais c'est dominant comme goût et ne va vraiment pas avec tout! Une bonne huile des baux de Provence c'est excellent mais les prix sont vraiment exhorbitants...

[Anne]

Trois huiles d'olives différentes dans une maison française, c'est énorme.
J'en ai trois aussi, avec chacune son usage.
Mais c'est vrai qu'en France, les prix du haut de gamme sont absolument prohibitifs. Depuis mon retour, j'ai révisé mes prétentions à la baisse.

[alvige]

...l'huile d'olive, nous l'avons vraiment appréciée lors d'un séjour en Crête et depuis ce voyage, elle fait partie de notre quotidien.

C'était surprenant de goûter l'huile sur les marchés et d'en apprécier la douceur caractéristique de la production grecque, alors que nos palais de Français de l'ouest étaient marqués dans le mauvais sens du terme par les huiles d'Espagne ou d'Italie bon marché limitées désormais chez nous à la cuisson.

[Anne]

À propos de dégustation...
Un jour, en Espagne, j'ai accompagné une copine chez son producteur attitré. Un endroit paumé au bout du monde, après des kilomètres de chemins plein de trous, de cahots et de virages au milieu des oliviers.
On a débarqué dans une ferme d'un autre âge, chez un papy et une mamie adorables, très flattés de recevoir une dame française, qui ont absolument tenu à nous faire découvrir la meilleure façon d'apprécier leur huile. Au lieu du traditionnel morceau de pain, la femme a versé un bon centimètre d'huile dans une poêle avec une paire de sardines séchées, qu'elle a fait chauffer jusqu'à ce que ça fume bien. Puis elle a enlevé les sardines qu'elle a données à ses chats et a cassé des oeufs dans l'huile où elle les a fait frire. Il y avait tellement de fumée dans la cuisine qu'on ne se voyait presque plus...
Ma copine a lâchement prétexté qu'elle conduisait pour se défiler devant le tord-boyau maison, mais moi, malgré mes protestations, il m'a fallu y passer.
À 9h du matin, dans cette odeur, cette fumée, après les cahots et les virages de la route, ces oeufs qui nageaient dans l'huile, avec le tord-boyau pour faire descendre... dur, dur. Et le chemin du retour...
Dans des conditions normales, leur huile était effectivement excellente, mais je n'ai jamais osé y retourner, j'avais trop peur qu'on me refasse le coup des oeufs...